Coup de coeur!

La Sirène d’Isé
de Hubert Haddad

aux Éditions ZULMA

Le coup de cœur de la rentrée d’hiver, et peut-être bien de l’année 2021 !

(Isé, au Japon, sanctuaire de la déesse du Soleil AMATERASU)

Pour Livresse la publication d’un nouveau roman de Hubert Haddad est toujours un événement particulier, le souffle du poète-écrivain qui passe la porte et se répand partout dans la librairie comme un doux et joyeux vent d’été.
Non seulement La Sirène d’Isé n’y fait pas exception mais il transporte avec lui la lumière du soleil que l’écriture somptueuse, riche et soigneusement ciselée de Hubert Haddad, reflète à chaque page, à chaque ligne. Attendez la toute fin, mais quelle merveilleuse phrase de cet auteur « magnifique », qui résume le chemin singulier de la métamorphose du monde!

Le monde de Malgorne, fils sans père – sourd, et donc muet – de Leeloo, femme lumière, éphémère mais présente partout, comme l’ombre sans nom qui la poursuit, ce monde est aussi celui du domaine des Descenderies – ancienne clinique psychiatrique – sur les falaises de la baie d’Umwelt, et de son labyrinthe d’arbres géants « construit»  par le Docteur Riwald  selon un schéma arithmétique afin que personne n’en trouve la sortie s’il n’est musicien averti… ou Malgorne lui-même.
Ce monde est aussi celui où Malgorne rencontre Peirdre, jeune fille solitaire aux regards ouverts sur l’océan d’où son père absent l’appelle, ainsi que Miranela son amie d’enfance.
Cernés par des personnages eux-mêmes hors du commun, tous deux seront à la fois objets et sujets du monde qui se transforme, du « milieu » (Umwelt) dans lequel ils « deviennent », qui emportera tous les personnages ayant participé à son façonnement, dans des destins divers formant monde eux-mêmes.

« Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l’abîme,
Ô Beauté !.. »
Baudelaire (Hymne à la Beauté)


Charles BAUDELAIRE


1821 – 1867

Hymne à la beauté

Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l’abîme,
Ô Beauté ! ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l’on peut pour cela te comparer au vin.

Tu contiens dans ton oeil le couchant et l’aurore ;
Tu répands des parfums comme un soir orageux ;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l’enfant courageux.

Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien ;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.

Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques ;
De tes bijoux l’Horreur n’est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.

L’éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,
Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau !
L’amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l’air d’un moribond caressant son tombeau.

Que tu viennes du ciel ou de l’enfer, qu’importe,
Ô Beauté ! monstre énorme, effrayant, ingénu !
Si ton oeil, ton souris, ton pied, m’ouvrent la porte
D’un Infini que j’aime et n’ai jamais connu ?

De Satan ou de Dieu, qu’importe ? Ange ou Sirène,
Qu’importe, si tu rends, – fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! –
L’univers moins hideux et les instants moins lourds ?